Quel type de caméra j’utilise pour mon jeu coopératif ?
Vous avez sûrement entendu parler de FPS (First Person Shooter – Jeu de tir à la première personne) ou TPS (Third Person Shooter – Jeu de tir à la troisième personne) dans votre vie de joueur. Ces deux acronymes distinguent un style de jeu bien connu dans le paysage vidéoludique : les jeux de tirs.
Ce qui m’intéresse dans l’utilisation de ces deux mots, c’est leur différence relativement singulière. Elle provient du point de vue utilisé pour afficher la scène dans laquelle se déroule l’action : tandis qu’un FPS se joue à la première personne, et que les yeux de votre personnage ne font qu’un avec les vôtres (caméra subjective), le TPS vous place en retrait de l’avatar que vous incarnez (caméra objective).
Si je vous explique cela, c’est pour vous emmener vers un élément précis du développement de jeu vidéo, la première chose que je dois configurer quand j’ouvre Game Maker Studio : la caméra.
La caméra dans un jeu, c’est une question de point de vue
Mais alors pourquoi choisit-on un style de caméra plutôt qu’un autre ? Pas de recette magique, la décision est prise en fonction de ce que moi, game designer en charge de définir les mécaniques du jeu, souhaite faire de ce dernier. Pour vous donner un exemple, le raisonnement peut être le suivant :
J’ai besoin d’immersion ? Une vue à la première personne semble idéale. Mon personnage est hyper customisable, mais je ne le vois jamais ? Essayons une vue objective pour profiter d’avantage de l’esthétique donnée à mon avatar. Je souhaite voir la position des ennemis en permanence ? Pourquoi ne pas opter pour une caméra en vue fixe de dessus.
“Les caméras dans les jeux, c’est quelque chose de délicat parce qu’elles peuvent être utilisées à deux fins complètement différentes : servir le gameplay ou dans un but esthétique.”
Game Maker’s Toolkit
Il est donc possible de créer un même genre de jeu vidéo avec des points de vue totalement différents. Reprenons nos jeux de tirs et examinons les différentes caméras de quatre titres connus :
- Overwatch – Caméra en vue à la première personne
- Plants vs Zombies – Caméra en vue à la troisième personne
- Hotline Miami – Caméra mobile en vue de dessus
- Wii Play Tanks – Caméra fixe en vue de dessus
Quatre jeux de tir, quatre caméras différentes, sans comparer les niveaux de zoom, la vitesse de déplacement de la caméra, les transitions entre les différentes scènes… Mais si vous vous découvrez une passion caméra et que vous souhaitez approfondir le sujet, je vous invite à regarder cette vidéo. Je pense que vous avez compris l’idée derrière tout ça : peu importe le type de jeu, ce qui compte dans le choix de la caméra, c’est avant tout une envie, un besoin ou une contrainte technique.
Avantages et inconvénients – Écran unique vs Écran partagé
Écran unique, vision tyrannique
J’adore les jeux multijoueurs, bien plus que je n’affectionne les aventures en solo (Skyrim, tu as quand même une place dans mon cœur, surtout depuis ce mod). C’est un plaisir de pouvoir construire, cuisiner, détruire ou encore explorer à plusieurs. Mais je déteste quand je suis confiné dans un écran unique et que ma liberté est liée à quelqu’un qui préfère ramasser des fleurs plutôt qu’exploser un monstre à grands coups d’épée.
Le meilleur exemple qui me vient en tête, c’est Super Mario Bros sur Wii, jouable jusqu’à quatre joueurs en simultané sur un seul et même écran. On peut alors penser que le choix de l’écran unique découle sûrement soit d’une contrainte technique, soit d’une volonté des games designers d’obliger les joueurs à travailler de pair pour terminer un niveau, en leur proposant de nombreuses façons d’interagir entre eux.
Les avantages :
- Pas d’éléments d’interface dupliqués
- Favorise la coopération
Les inconvénients :
- Une liberté de mouvement limitée
- Le danger n’est pas toujours visible
Écran partagé, vision clonée
Une des autres solutions est la création d’autant de caméras qu’il y a de joueurs (l’inverse d’un écran unique). On parle alors de “Split screen”, des écrans qui peuvent être horizontaux ou verticaux, selon le bon vouloir des games designers (encore et toujours ceux-là). C’est une façon de faire qui fonctionne bien dans la plupart des cas, et les joueurs sont habitués à ce genre de comportement. Stardew valley, jeu de gestion de ferme que j’affectionne particulièrement, utilise ce type de caméra. Ma copine me laisse tuer des monstres pendant qu’elle s’occupe des fleurs, tout le monde est content.
D’ailleurs, si vous n’avez pas joué Stardew Valley qui vient de passer le cap des 20 millions de ventes, je vous invite à l’essayer. Vous réaliserez que passer la soirée à récupérer des panais dans Pélican Ville est un passe-temps tout à fait relaxant, bien plus que de devoir négocier un nouveau prêt avec Tom Nook.
Les avantages :
- Une totale liberté dans les déplacements
Les inconvénients :
- Les écrans semblent clonés à certains moments
- Une vision réduite du jeu
- Les éléments d’interface risquent d’être dupliqués
L’écran partagé dynamique, le Saint-Graal ?
Une troisième solution est de combiner les avantages des deux caméras citées plus haut. L’idée, qui n’est pas de moi, est notamment apparue dans les jeux Lego. L’utilisation de ce style de caméra est séduisante parce qu’elle permet de corriger les quelques soucis et inconvénients dont je parle ci-dessus.
Quand les joueurs sont assez proches l’un de l’autre, la caméra est unique et permet de voir l’ensemble d’un seul et même écran. À l’inverse, quand les personnages s’éloignent, la caméra se transforme en un écran partagé, et chaque avatar dispose alors de sa propre vue sans être limité par les déplacements d’autrui. De plus, l’écran se coupe en deux en suivant l’emplacement et la position des joueurs, pas besoin de choisir entre un découpage horizontal ou vertical, ici tout est dynamique.
Il y a des grandes chances qu’en raison de sa rareté vous ne l’ayez jamais rencontré, mais cela existe bien (comme les shiny), et on appelle ça un écran partagé dynamique. Il y a d’ailleurs un talk de la Game Developers Conference qui en parle ici.
Cette solution n’est cependant pas parfaite et apporte son propre lot de soucis, notamment le fait que, selon l’angle de découpage de l’écran, la vision du joueur peut parait obstruée, mais c’est la solution que je vais essayer de mettre en place dans mon jeu. Dans mon prochain devlog, je vous parlerai de la façon dont j’ai développé cette caméra, et des problèmes que j’ai rencontré, vidéos à l’appui.
À plus !